Issus de trois générations différentes, les Peintres juifs de Montréal ont profondément marqué l'histoire de l’art pictural canadien. Entretenant des liens plus ou moins étroits, ils ont été actifs du début des années 1930 à la fin des années 1950.
L’expression « Peintres juifs de Montréal » a été utilisée pour la première fois en 1987 par l’historienne et conservatrice d’art québécois Esther Trépanier. Elle travaillait alors à la mise sur pied d’une exposition consacrée aux œuvres du groupe au YM-YWHA (Young Men’s-Young Women’s Hebrew Association). En raison de l’âge varié et des différentes affiliations artistiques de ses membres, le collectif produisait des œuvres aux styles multiples. Elles oscillaient entre autres entre un réalisme social radical et un expressionnisme exagéré. Néanmoins, les Peintres juifs de Montréal partageaient les mêmes sujets. Ils ont notamment illustré le quotidien de la classe ouvrière vivant au centre-ville ainsi que leur idéalisme de gauche issu d’Europe de l’Est.
Les membres du groupe étaient soit de nouveaux immigrants provenant des shtetls (bourgades juives) est européen, soit des enfants de ces mêmes immigrants. Ainsi, la production culturelle de ces artistes reflète une sensibilité juive internationale jamais observée auparavant sur la scène artistique canadienne. Parmi les artistes les plus connus de la première génération du groupe, on compte, entre autres, Alexandre Bercovitch (1891-1951), Eric Goldberg (1890-1959) et Bernard Mayman (1885-1966). La deuxième génération comporte quant à elle Sam Borenstein (1908-1969), Louis Muhlstock (1904-2001), Ernst Neumann (1907-1956), Fanny Wiselberg (1906-1986) et Jack Beder (1910-1987). Enfin, Sylvia Ary (1923-2011), Rita Briansky (1925-), Ghitta Caiserman-Roth (1923-2005), Moses (Moe) Reinblatt (1917-1979) et Alfred Pinksy (1921-1999) font partie de la troisième génération des Peintres juifs de Montréal.
Le collectif dépeignait les réalités sociales de son époque, évoquant notamment les épreuves et les inégalités avec lesquelles les immigrants juifs devaient composer. Le penchant socialiste des Peintres juifs de Montréal se voulait une réponse à peine voilée à l’antisémitisme rampant observé en Allemagne, mais aussi au Québec, où l’adoption en 1937 de la « loi du cadenas » a suscité une vive inquiétude au sein de la communauté juive. Cette loi permettait au procureur général de fermer, pendant un an, tout édifice soupçonné de servir à la propagande communiste ou bolchevique.
Les Peintres juifs de Montréal ont contribué à leur façon à l’effort de guerre canadien durant la Seconde Guerre mondiale. Moses Reinblatt s’est enrôlé dans l’Aviation royale du Canada en 1942. Deux ans plus tard, il a pris part au programme officiel d’art militaire du Fonds de souvenirs de guerre canadiens. Alfred Pinsky était quant à lui représentant syndical au sein de la Marine royale canadienne. De nombreux peintres juifs ont également participé à l’effort de guerre en peignant les travailleurs des usines canadiennes. Réalisée en 1943, la toile de Louis Muhlstock intitulée Female Worker, Rear View met en scène une femme ouvrière vêtue d’un bleu de travail. Par cette œuvre, l’artiste souhaitait mettre en lumière l’égalité du travail des hommes et des femmes pendant les périodes de guerre et de conflit.
Au début des années 1930, plusieurs des Peintres juifs de Montréal ont commencé à gagner la faveur de la presse anglophone. Les expositions qui ont été présentées au YM-YWHA ont été accueillies positivement par les critiques canadiens. Avant la fin des années 1940, de nombreux artistes, dont Alexandre Bercovitch, Louis Muhlstock, Ernst Neumann et Moses Reinblatt ont vu leurs œuvres être exposées au Musée des beaux-arts du Canada. En 1959, les compositions du groupe ont fait l’objet d’une exposition intitulée Works by Canadian Jewish Artists au Musée des beaux-arts de Montréal. Grâce au travail d’Esther Trépanier en 1987, les membres du groupe ont connu un regain de popularité appréciable au cours des dernières décennies. Cette attention renouvelée à leur égard a mené diverses institutions publiques, dont le Musée des beaux-arts du Canada, les Archives nationales et le Musée de Québec, à faire l’acquisition de plus 150 de leurs œuvres.
Esther Trépanier soutient que le collectif a largement contribué au rayonnement international de l’art pictural canadien. Selon elle, « les artistes de la communauté juive de Montréal n’ont pas seulement contribué à définir la modernité culturelle au Québec et au Canada pendant l’entre-deux-guerres; ils ont aussi aidé à enrichir et à embellir son épanouissement ».
Sources :
http://jwa.org/encyclopedia/article/caiserman-roth-ghitta
http://www.quebec-elan.org/histories/oneView/10
http://outlookmagazine.ca/images/outlook/issues/23/Jewish%20painters.pdf
http://cjournal.concordia.ca/archives/20080403/reminiscing_about_jewish_montreal.php
http://imjm.ca/location/1278
http://www.artsask.ca/en/artists/moereinblatt
http://www.gallery.ca/cybermuse/servlet/imageserver?src=DO92-1000&ext=x.pdf
http://www.gallery.ca/en/see/collections/artist.php?iartistid=438
http://cybermuse.gallery.ca/cybermuse/enthusiast/thirties/interviews_e.jsp?idocumentid=14
http://cybermuse.gallery.ca/cybermuse/enthusiast/thirties/artist_e.jsp?iartistid=601
http://www.worldcat.org/title/jewish-painters-of-montreal-witnesses-of-their-time-1930-1948/oclc/184738902
http://www.musee-mccord.qc.ca/pdf/PR/PR_peintres_juifs_EN.pdf
http://e-artexte.ca/96/
http://spectrum.library.concordia.ca/3618/1/ML51395.pdf